INFORMATIQUE ET MYSTICISME
Par la section Informatique de l'U.R.C.I. www.urci.org
Associer les mots «informatique»
et «mysticisme» peut surprendre au premier abord. En effet, comment
l’ordinateur, structure purement matérielle, peut-il avoir un rapport avec le mysticisme
? C'est à cette question que nous allons essayer de répondre dans cet exposé.
L'ordinateur
Tout d'abord, il faut préciser que l'informatique est apparue vers 1940. D'une
manière générale, son but est de concevoir des programmes, ou logiciels, permettant
d’automatiser des tâches répétitives. Il existe divers domaines informatiques :
la gestion des données, le calcul scientifique, le graphisme, etc. Dans tous
les cas, nous trouvons à la base un ordinateur. Celui-ci est composé de
plusieurs parties. L’unité centrale renferme un processeur, principal organe de
décision, véritable “cerveau” de la machine, par lequel passe toute
information. Un micro-code est contenu dans la «mémoire morte», qui renferme
des informations de manière permanente, installées à la création de
l'ordinateur. C’est en quelque sorte son code génétique. La «mémoire centrale»,
appelée également «mémoire vive», conserve les informations tant que la machine
est allumée. On peut la comparer à la mémoire à court terme de l’homme. Il existe
aussi une «mémoire de masse», qui permet d’ajouter un très grand nombre
d’informations et de les conserver en permanence. On utilise alors un support
physique, comme une disquette ou un disque. On peut comparer cette mémoire,
soit à notre mémoire à long terme, soit à des cahiers sur lesquels on noterait
des informations.
La plupart des individus retiennent un numéro de téléphone plusieurs minutes
après qu’on leur ait donné, mais l'ont oublié quelques jours plus tard. Ceci
correspond à la mémoire vive de l'ordinateur. En revanche, si nous apprenons
par cœur ce numéro pour en faire une donnée de notre mémoire à long terme, nous
pouvons le retrouver après plusieurs semaines, même s'il faut pour cela faire
un effort de mémoire. Ceci correspond à la mémoire de masse de l'ordinateur.
Indépendamment de ces différents types de mémoire, il possède aussi un langage
appelé «système d’exploitation». En général, un ordinateur fonctionnant avec un
système d’exploitation particulier est incapable de lire des données écrites à
partir d’un autre système, de la même manière qu’un être humain ne comprend pas
un livre écrit dans une autre langue que la sienne. Il y a cependant des
exceptions, comme pour les hommes, dont certains comprennent et parlent
plusieurs langues. Un parallèle humain / ordinateur est donc possible.
Tout comme l’homme ne vit pas
isolé et communique avec d’autres hommes au moyen de la parole ou de l'écrit,
l’ordinateur utilise les «réseaux informatiques» pour envoyer des informations
vers d’autres ordinateurs et en recevoir à son tour. C'est ainsi qu'ils sont
capables de s'adresser en quelques secondes un message depuis un pays vers un
autre, et même depuis l'espace vers la Terre. Il peut s'agir d'un texte, d'un
son ou d'une image. A ce propos, nous constatons que les sons synthétiques
envahissent la musique moderne et que les images de synthèse sont de plus en
plus présentes sur les écrans de cinéma et de télévision. Plus que jamais, on
peut se demander si ce que nous entendons et voyons existe réellement ou n'est
qu'une création artificielle.
Arrêtons-nous quelques instants
sur les images en trois dimensions, entièrement créées par ordinateur. Il
s’agit de dessins comportant une répétition de motifs quelconques. En les
regardant d’une certaine façon, il est possible de voir apparaître un autre
dessin en relief. Derrière cet autre dessin peut s’en cacher un troisième,
parfois même un quatrième... L’observateur a alors l’impression de découvrir
des choses cachées derrière les apparences de l’image première et de passer
dans une autre dimension. Par analogie, nous pouvons nous demander si le monde
que nous percevons au moyen de nos sens objectifs ne cachent pas lui aussi
d'autres plans d'existence. D'un point de vue rosicrucien, tel est
effectivement le cas.
La correspondance humain/ordinateur
Les correspondances que nous pouvons établir entre un ordinateur et un être
humain posent la question de savoir si notre vie ne s'apparente pas également à
une pièce de théâtre ou à un film où tout n'est qu'illusion. A priori non, car
nous ne sommes ni passifs ni uniquement spectateurs. A tout moment, nous
pouvons utiliser notre libre arbitre et modifier le cours des événements grâce
aux choix que nous faisons. Cela dit, il existe aujourd’hui des films de
synthèse contenant des séquences différentes selon les choix faits par
l’utilisateur. Ainsi, il est possible d’interagir directement sur leur
déroulement. Les scènes varient alors en fonction de la programmation qui est
faite, ce qui implique malgré tout une intervention humaine.
Grâce à l'informatique, il est désormais possible de s'immerger complètement
dans un monde créé par ordinateur. A cet effet, on se munit d'un casque spécial
qui recouvre toute la tête et nous isole totalement de ce qui nous entoure. Des
images sont alors projetées directement devant nos yeux, et des gants spéciaux
servent de capteurs pour agir sur l’environnement virtuel. A titre d'exemple,
des personnes éloignées de plusieurs centaines de kilomètres peuvent se
rencontrer virtuellement dans des lieux reconstitués par images de synthèse.
Avec ce genre de technologie, on obtient une suppression du temps et de
l'espace. Faut-il s'en réjouir ou le déplorer ? A chacun sa réponse.
Comme le montrent les
explications précédentes, l’ordinateur, dans sa structure et dans son
fonctionnement, possède des points communs avec l’être humain. Devons-nous en
déduire que l’homme a “créé une machine à son image” ? Notre société est-elle
en train d’engendrer un Golem, au sens kabbalistique du terme, c'est-à-dire une
créature qu'il ne parviendra plus à contrôler ? Il faut espérer que non.
L'homme est un être triple ; il possède un corps physique, un corps psychique
et une âme. En l'état actuel des choses, la comparaison, si comparaison il y a,
s’arrête au niveau matériel, c'est-à-dire à celui du corps physique. Autrement
dit, les vibrations propres à la matière sont bien contenues dans un
ordinateur, mais il est dépourvu de vie et de conscience.
S'il est vrai que l'ordinateur
n'est pas véritablement conscient, on trouve aujourd’hui des logiciels dotés de
capacités de raisonnement. Cette branche de l’informatique, née vers 1950, a
pour but de modéliser et de reproduire le comportement humain. Pour cela, elle
fait appel à d’autres domaines, tels que la psychologie, la linguistique, la
psycholinguistique, la philosophie et la logique. Ainsi, il existe aujourd’hui
des ordinateurs capables de battre aux échecs des joueurs chevronnés, utilisant
pour cela des programmes issus de l’intelligence artificielle. Par ailleurs, on
a vu apparaître la notion de «système expert», logiciel capable d’adopter le
raisonnement d’un expert dans un domaine précis, par exemple pour le diagnostic
d'une panne de voiture, la détection de la rubéole chez la femme enceinte,
l’identification et la classification de champignons à partir de leurs
descriptions, etc.
L’intelligence artificielle de
l'ordinateur concerne essentiellement deux domaines : le raisonnement et le
savoir. Différents modes de raisonnement sont ainsi reproduits en informatique
: déductif, inductif, analogique. De même, des recherches ont été menées pour
synthétiser et rendre accessibles le maximum de connaissances, et ce dans tous
les domaines du savoir humain. La notion de «métaconnaissance» existe
également. Elle concerne la «connaissance sur la connaissance», c’est-à-dire la
modélisation de ce que l’on sait et même de ce que l'on ignore. Ainsi, certains
ordinateurs sont capables de s’auto-analyser et de dissocier ce qu’ils savent
de ce qu'ils ne savent pas. Dans une certaine mesure, ils ont, non pas
conscience d'eux-mêmes, mais conscience des connaissances qu'ils renferment,
notion très intéressante d’un point de vue philosophique.
Le mythe du Golem
En plus du raisonnement et du
savoir, l'intelligence artificielle intègre la notion d'«apprentissage
automatique». Cette notion est basée sur des programmes permettant à
l'ordinateur d’apprendre seul, sans aucune intervention humaine, et de
communiquer avec d'autres ordinateurs dans le but de résoudre un problème
précis. Ainsi, ils s’associent pour réaliser des tâches complexes, chacun étant
plus ou moins spécialisé dans un domaine particulier. Là encore, l’homme donne
l'impression d'avoir “créé à son image” un être capable de l’aider pour
l’accomplissement de certaines tâches, mais aussi de le remplacer purement et
simplement. Il apparaît donc que le mythe du Golem ne relève pas d’une mystique
archaïque et dépassée par les progrès de la science et de la technologie. Au
contraire, il se trouve au coeur de l’activité scientifique la plus moderne.
Selon Moshe Idel, Kabbaliste éminent, «la création du Golem constitue une
tentative humaine visant à connaître Dieu par le moyen que Dieu mit en oeuvre
pour créer l’homme». Cette phrase résume tout le problème posé.
Qui aurait pu imaginer que des connaissances encyclopédiques pourraient être
disponibles à travers un réseau informatique et même tenir sur un minuscule
disque CD-ROM ? Qui aurait pu croire que les hommes transmettraient leurs
calculs ou leurs projets à l’autre bout de notre planète en quelques minutes
grâce à l’Internet ? Chacun pouvant informatiser le type d’informations qu’il
souhaite transmettre à d’autres, l'informatique est le reflet de la société
actuelle, dans ce qu'elle a de meilleur et de pire. De toute évidence, elle
évoluera selon les centres d’intérêt de ses utilisateurs. On peut donc espérer
qu'elle contribuera à guider l'humanité vers la connaissance et la
spiritualité, ce qui implique que les hommes eux-mêmes s'élèvent en conscience
et en fassent un bon usage. Ainsi, selon ce qu'il fera de l'ordinateur, l'homme
peut, soit progresser vers la lumière du spiritualisme, soit se perdre dans les
ténèbres du matérialisme.